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1.4.1. L’éviction du français d’Angleterre

La guerre de Cent Ans contre les Anglais a fait naître un fort sentiment nationaliste, tant en France qu’en Angleterre. Paradoxalement, c’est en pleine guerre de Cent Ans contre les Français que les Anglais ont choisi une devise en français (« Honi soit qui mal y pense », avec un seul n) pour l’ordre de la Jarretière officiellement appelé Ordre très Noble de la Jarretière (en anglais: The Most Noble Order of the Garte).

En réaction contre la France, le Statute of Pleading du Parlement anglais a reconnu dans un texte rédigé en français l’anglais comme une langue unique des tribunaux, mais dans les faits le français reste une langue employée jusqu’en 1731, malgré la déclaration du Parlement de 1362, qui décidait de faire de l’anglais la langue juridique du pays. Voici un extrait de la déclaration de 1362 rédigé en « français d’Angleterre » (et en traduction française contemporaine):

Item, pur ce qe monstré est soventfois au Roi [...] les grantz meschiefs qe sont advenuz as plusours du realme de qe les leyes, custumes et estatuz du dit realme ne sont paa conuz comonement [...] par cause q'ils sont pledez, monstrez et juggez en la lange Franceis, q'est trop desconue en dit realme [...] les dites leyes et custumes seront le plus tost apris et conuz et mieultz entenduz en la lange usee en dit realme [...]. Le roi [...] ad [...] ordeigné et establi [...] qe toutes plees [...] soient pledez, monstrez, defenduz [...] et juggez en la lange engleise, et q'ils soient entrez et enroullez en latin.

[De même, parce qu'il a été souvent montré au roi les grands dommages qui sont arrivés à plusieurs personnes du royaume parce que les lois, coutumes et statuts dudit royaume ne sont pas communément connus, parce qu'ils sont plaidés, exposés et jugés en langue française, qui est très méconnue dans le royaume, lesdits lois et coutumes seront plus vite apprises et sues et mieux comprises dans la langue utilisée dans ledit royaume. Le roi a ordonné et établi que toute plaidoirie soit plaidée, exposée, défendue et jugée en langue anglaise, et qu'elle soit enregistrée et transcrite en latin.]

Le texte dit clairement que le français était une langue méconnue dans le royaume et que « le roi a ordonné et établi que toute plaidoirie soit plaidée, exposée, défendue et jugée en langue anglaise, et qu’elle soit enregistrée et transcrite en latin ». La même année, c’est donc en anglais que le chancelier a ouvrert les séances du Parlement, mais le changement de langue ne s’est fait pas instantanément, au contraire. Les résultats ont paru sans doute décevants, car ce n’était qu’une vingtaine d’années plus tard, soit à partir de 1386, que les registres et débats du Parlement étaient rédigés en anglais; qui plus est, le français a continué d’être utilisé avec l’anglais jusque vers 1430. Par la suite, le français a perdu graduellement la place privilégiée qu’il avait dans l’enseignement. À partir de 1349, l’université d’Oxford a dispensé son enseignement en anglais, alors qu’auparavant c’est en français que se faisait l’enseignement universitaire. On a commencé à enseigner l’anglais dans quelques « grammar schools », puis toutes les écoles ont fini par suivre le mouvement. Néanmoins, les manuels utilisés pour le commerce, par exemple à l’université d’Oxford, étaient rédigés en français jusqu’au milieu du XVe siècle [7, p.22].

Après la défaite d’Azincourt (1415), le traité de Troyes (1420) a reconnu Henry V d’Angleterre comme héritier du royaume de France. Mais Henry V était le premier roi d’Angleterre à utiliser l’anglais dans les documents officiels; il a écrit son testament en anglais. Le français a continué à être employé oralement à la cour anglaise, car la plupart des reines d’Angleterre venaient de France. Henry V avait épousé Catherine de Valois, fille du roi de France Charles VI. Quant aux Français, s’ils étaient instruits, ils n’écrivaient plus en français dialectal, c’est-à-dire dans les langues d’oïl, mais en français ou en latin.

C’est la linguiste Henriette Walter qui affirme dans son livre Honni soit qui mal y pense que, sans l’intervention de Jeanne d’Arc, les Anglais restés en partie francophones auraient pu adopter définitivement le français et transporter plus tard cette langue dans les futurs États-Unis d’Amérique et ailleurs [21, p.63]. Même s’il ne s’agit là que d’une hypothèse, les chances du français de s’implanter en Angleterre auraient été incontournables. Ou bien le duc de Bourgogne ou bien le roi d’Angleterre aurait occupé le trône de France en lieu et place des Valois; or, ces deux prétendants parlaient le français. Ayant conservé la moitié de leurs terres en France, les « rois-anglais-de-langue-maternelle-française » n’auraient certainement pas eu cette réaction anti-française qu’ils ont développée par la suite, une fois « boutés hors de France ». Autrement dit, la conquête de la France par les Anglais aurait assuré la pérennité du français en Angleterre grâce à la fusion des deux royaumes. Dans ce cas, le français aurait certainement dominé sur l’anglais. Par la suite, la répartition mondiale des langues aurait aujourd’hui une toute autre apparence [3, p.43].

On ne possède pas beaucoup d’indices sur le niveau de culture linguistique des Français en général, et mȇme de l’élite aristocratique et militaire. On peut supposer que la connaissance de l’anglais n’était pas aussi répandue sur le Continent que celle français Outre-Manche.

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