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- •Xviie et xviiie siècles : la mise à l'écart de la « canaille exquise » (La Bruyère)[modifier | modifier le code]
Xviie et xviiie siècles : la mise à l'écart de la « canaille exquise » (La Bruyère)[modifier | modifier le code]
L'esprit du classicisme français, son goût de la mesure et de la bienséance, s'accordent mal avec la prose exubérante de Rabelais. Le jugement de Jean de la Bruyère va dans ce sens : tout en lui reconnaissant du talent, le moraliste lui reproche d'avoir « semé l'ordure dans ses écrits »145. Néanmoins, plusieurs écrivains assez indépendants, comme La Fontaine, Molière et la Marquise de Sévigné146 le tiennent en grande estime, voire s'en inspirent parfois147.
Au début du xviie siècle, les personnages rabelaisiens se retrouvent toutefois dans les milieux mondains ou des ballets sans profondeur, comme le ballet des QuolibetsN 16 et le ballet des Pantagruélistes, dont l'auteur est inconnu148. Plus le siècle progresse, plus les admirateurs de Rabelais se trouvent être au contraire des érudits et des libertins. Les médecins Guy Patin et Paul Reneaulme, le grammairien Ménage proposent diverses interprétations allégoriques. Ce dernier s'inspire du romancier pour son Dictionnaire étymologique149.
Satire de la Révolution française. Gargantua et sa suite consultent l'Oracle pour connaître l'avenir de la monarchie.
Alors que l’œuvre se répand outre-manche grâce aux traductions de Sir Thomas Urquhart (1653 et 1693) et de Pierre-Antoine Motteux (1694), elle se heurte à la réaction jésuite. Le Père Garasse écrit un ouvrage dirigé contre les protestants intitulé Le Rabelais réformé par les Ministres dans lequel l'humaniste s'accuse lui-même de futilités coupables à l'égard des puissants. Les libertins Gassendi, Vanini et Bruno attribuent au contraire leurs préoccupations à Rabelais : la recherche d'une religion naturelle et la critique des croyances établies150.
Au xviiie siècle, quatre positions se dessinent : les savants considérant Rabelais comme un allié dans le combat anticlérical, cependant choqués par son langage, les érudits attachés à l'élucidation du texte, les religieux outrés par les blasphèmes et les amateurs de gaudrioles. L'opinion de Voltaire s'améliore au fil de sa vie. Dans un passage du Temple du goût, les bibliothèques regorgent de livres corrigés par les Muses : seul un demi-quart des écrits du Tourangeau sont conservés151. Néanmoins, si le philosophe n'apprécie pas le style truculent et la grossièreté, il pense que Rabelais cherchait, par ses inepties, à échapper à une censure meurtrière et le considère comme le premier des bouffons152. L'interprétation subversive est portée à son paroxysme lorsqu'en pleine Révolution, l'écrivain Pierre-Louis Guinguené convoque le franciscain comme un prophète méconnu153,N 17.