Добавил:
Upload Опубликованный материал нарушает ваши авторские права? Сообщите нам.
Вуз: Предмет: Файл:
Histoire_du_francais_seminaires.doc
Скачиваний:
54
Добавлен:
28.03.2016
Размер:
231.42 Кб
Скачать

La chanson de roland

Notice historique

La Chanson de Roland est un poème épique de 4002 décasyllabes 1), coupés après le quatrième pied, groupés en 291 laisses, strophes de longueur inégale, construites chacune sur la même assonance 2). Elle a probablement été composée vers 1100, peut-être par Turoldus, dont il est dit à la fin du poème. Ce poème est considéré comme le premier de son genre et comme le chef-d'œuvre des chansons de geste. Il appartient au Cycle du Roi (c.-à-d. de Charlemagne). Le poème se trouve dans le manuscrit 23 du fonds Digby de la Bibliothèque Bodléienne à Oxford. Il est l'œuvre d'un scribe anglo-normand et reproduit le français qui se parlait en Angleterre vers 1170.

Le sujet en est un combat insignifiant qui eut lieu dans un vallon boisé près de Roncevalles (fr. Roncevaux) dans les Pyrénées, en 778. Des Basques y ont attaqué l'arrière-garde de l'armée de Charlemagne qui rentrait en France. Le poème réinterprète l'épisode à la lumière de l'esprit de croisade et transforme l'incident en bataille sanglante entre les Sarrasins et les Français. Il  met en scène un personnage qui deviendra un des plus grands héros romanesques du Moyen Âge et de la Renaissance, le preux Roland, ainsi qu'une rangée de héros secondaires, mais qui deviendront également légendaires: le sage Olivier, Ogier le Danois et bien d'autres.

1. vers de dix pieds ou de dix syllabes

2. Les assonances: arbre / marbre; mot / noz; conue / tenue.

Le contenu du poème

Charlemagne a conquis en sept ans toute l'Espagne sauf Saragosse, que tient Marsile, roi des Sarrasins. Marsile souhaite voir Charles quitter le pays. Sur conseil d'un de ses hommes, Blancandrin, il envoie à Charles une ambassade: il recevra le baptême si les Français retournent chez eux. Charlemagne décide de traiter. Roland, Olivier et Turpin, l'archevêque, se proposent pour négocier avec Marsile, mais Charles ne veut pas envoyer un des douze pairs. Il choisit Ganelon, baron d'une de ses marches, père adoptif de Roland, comme ambassadeur. Ganelon s'en prend violemment à Roland, qui l'a proposé pour cette mission périlleuse. Par dépit, il trahit son roi en livrant aux Sarrasins des renseignements sur l'armée. À son retour, il s'arrange pour que Roland en commande l'arrière-garde. Dans le col de Roncevalles, les Sarrasins surprennent Roland et sa troupe. Par trois fois, le sage Olivier demande à Roland de sonner l'Olifant, le cor qui pourra appeler du secours. Mais le preux Roland refuse. Il continue son combat héroïque avec son épée Durendal. Mourant, il accepte enfin de sonner le cor. Deux anges portent son âme au paradis. Charles revient et venge son neveu, en battant Marsile et en enlèvant Saragosse. Il entre à  Aix, sa ville de résidence. Là, la belle Aude, fiancée de Roland, meurt en apprenant le sort de celui-ci. Ganelon est jugé et déchiré par quatre chevaux. Le poème se termine par l'apparition de saint Gabriel: Charles, lève les armées de ton empire, par force tu iras en terre de Bire pour secourir le roi Vivien dans la cité d'Imphe, assiégée par les païens. Les chrétiens te réclament et t'appellent. L'empereur voudrait ne pas partir: Dieu!, soupire-t-il, que ma vie comporte de peines! Les larmes aux yeux, pleurant, il tire sa barbe blanche. Et le poème se termine au vers 4002 par la fameuse signature :Ci falt la geste que TUROLDUS declinet

Pendant la bataille dans les dfilés de Roncevaux, les Français restent maîtres du champ de bataille. Les païens fuient devant Roland. Mais Roland est blessé et ses compagnons périssent. Roland recueille les cadavres des paires et les fait bénir par l’archevêque Turpin mourant. Resté seul, couvert de blessures, il va mourir à son tour.

1. Dans La Chanson de Roland, la laisse correspond à une unité narrative autonome. Les répétitions, la reprise de thèmes analogues dans des laisses diffé­rentes caractérisent la transmission orale des textes par les jongleurs.

2. Les pairs de Charlemagne (comités palatini, comtes du palais impérial: les seigneurs de la suite de Charlemagne).

3. Dans la Chanson de Roland, l'Ange Gabriel est un intermédiaire entre Dieu et les hommes, selon le rôle que lui a attribué l'Évangile de Luc.

  1. Olifant: cor d'ivoire fait d'une défense d'élé­phant.

LECTURE ET ANALYSE DES TEXTES

CLXVIII Ço sent Rollant que la mort li est pres Par les oreilles fors se ist la cervel. De ses pers priet Deu ques apelt, E pois de lui a l’angle Gabriel. Prist l’olifan, que reproce n’en ait, E Durendal s’espee en l’altre main. D’un arcbaleste ne poet traire un quarrel, Devers Espaigne en vait en un guaret ; Muntet sur un tertre ; desuz un arbre bel(e) Quatre perruns i ad, de marbre fait(e). Sur l’erbe verte si est caeit envers : La s’est pasmet, kar la mort li est pres.

CLXIX Halt sunt li pui e mult halt les arbres. Quatre perruns i ad luisant de marbre. Sur l’erbe verte li quens Rollant se pasmet. Uns Sarrazins tute veie l’esguardet :

Si se feinst mort, si gist entre les altres ; Del sanc luat sun cors e sun visage. Met sei en piez e de curre s’astet. Bels fut e forz e de grant vasselage ; Par sun orgoill cumencet mortel rage ;

Rollant saisit e sun cors e ses armes, E dist un mot : « Vencut est li nies Carles ! Iceste espee porterai en Arabe. » En cel tirer(es) li quens s’aperçut alques.

CLXX Ço sent Rollant que s’espee li tolt. Uvrit les oilz, si li ad dit un mot : « Men escientre, tu n’ies mie des noz ! » Tient l’olifan, que unkes perdre ne volt, Sil fiert en l’elme, ki gemmet fut a or : Fruisset l’acer e la teste e les ós,

Amsdous les oilz del chef li ad mis fors ; Jus a ses piez si l’ad tresturnet mort. Apres li dit: «Culvert paien, cum fus unkes si ós Que me saisis, ne a dreit ne a tort ? Ne l’orrat hume, ne t’en tienget por fol.

Fenduz en est mis olifans el gros, Caiuz en est li cristals e li ors.»

CLXVIII De ses pers priet Deu ques apelt, E pois de lui a l’angle Gabriel. Prist l’olifan, que reproce n’en ait, E Durendal s’espee en l’altre main. D’un arcbaleste ne poet traire un quarrel, Devers Espaigne en vait en un guaret; Muntet sur un tertre; desuz un arbre bel(e) Quatre perruns i ad, de marbre fait(e). Sur l’erbe verte si est caeit envers : La s’est pasmet, kar la mort li est pres.

EXPLICATIONS

Les traits dialectaux reflétés dans les extraits sont les suivants:

a. [k] devant [a] à l’initial d’un mot reste invariable: Carles, caiuz;

b. [a] après [k] palatalisé passe à [e] au lieu de [ie] : caput > chef, aciarium > acer;

c. o est si fermé qu'il se rapproche de [u]. Dans l'orthographe ce son est rendu par la lettre u: sunt, sur, tute, uvrit.

d. la différence entre la prononciation de en et an se fait sentir: entre, cumencet, sent, grant, olifans.

e. dans le dialecte central e + consonne nasale > ein. Dans le dialecte anglo-normand au lieu de la diphtongue nasalisée s’est formée une voyelle nasale simple: e+n > ein > en: venut. Pourtant la forme ein est aussi possible: feinst.

Les traits de l'ancien français à relever sont les suivants:

1. La diphtongue [ai] vers la fin du XI siècle s'est réduite en [e] comme en témoignent certaines assonances de la Chanson. Pourtant ce changement n'est pas rendu par la graphie: caiuz ( = keüz), saisit).

2. Les autres diphtongues persistent et sont fidèlement transcrites à l'exception des diphtongues formées d'une voyelle + l + consonne. Dans ces dernières la vocalisation de [l] n'est pas encore notée: hatl, mult.

3. L'ancien français connaît des triphtongues, notamment [eau] qui provient de ę + l devant une consonne: bels. Dans ce cas, comme dans le précédent, la vocalisation de [l] n'est pas fixée et la graphie est en retard sur la prononciation.

4. Les occlusives disparaissent ([t] après une voyelle et dans la position médiane), ce qui est enregistré par l'orthographe: e au lieu de et, lüat est la 3 personne du passé simple du verbe luer qui a à l'origine le mot latin lutare, espee remonte au mot spatha.

5. Le [h] latin s'est amuï dans la prononciation depuis longtemps, par contre le [h] germanique a été prononcé, c’est pourquoi dans certaines régions, là où le fonds germanique est important le [h] latin commence à se prononcer et à être écrit sous l'influence du [h] germanique: hum. Par contre, dans certains mots germaniques le [h] n'est plus ni prononcé, ni écrit: l'elme - heaume < helm; s'astet - se hâter < haste à l'exemple des mots latins: l'erbe.

6. L'ancien français connaît deux sons mouillés: [l'] et [n'] rendus respectivement par ille, il et ign, in: orgoil.

7. [t] et [d] se combinent avec [s] final pour former l'affriquée [ts], orthographiée z : piez, forz.

8. Les consonnes [n] après r, [m], [p], [k], [f], [v] devant [s] final ne sont pas prononcées et les lettres correspondantes ne sont pas écrites: cors au lieu de corps.

9. Les affriquées qu'on trouve dans ces laisses sont les suivantes: [ts] iceste, piez; [dž] gis, vasselage.

10. [k] devant [u], [o] est représenté par c: cumencet, cors, vencut, et par q: quens, ue étant une diphtongue; [k] devant e, i est représenté par qu: alques, que; et par k: unkes.

11. L’orthographe du mot esguardet où le son [g] devant [a] est transcrit par gu indique l’origine germanique du mot.

Devoirs

1. Quelles sont les valeurs de l’article défini qui accompagne les mots la mort, les oreilles, les oiez, la cervel, l’olifan, l’acier, la teste, les os; li cristals e li ors; li nies Carles ? Observez la formation de l’article contracté del sanc, del chef et expliquez les particularités de la contraction en ancien français.

2. Observez l’emploi de l’article indéfini D’un arcbaleste ne poet traire un quarrel; vait en un guaret;  Muntet sur un tertre; desuz un arbre bel ; uns Sarrazins. Quelle est l’origine de cet article? La forme uns est remplacée en ancien français par des, persistant toutefois dans quelqu’un, quelques’un(e)s.

3. Expliquez l’absence de l’article devant Espagne, Arabe; mortel rage.

4. Observez l’emploi de la négation tu n’ies mie des noz. Quelles sont d’autres particules qui participent à la formation de la négation? La particule mie, subsite-t-elle de mos jours?

5. erbe verte: l’adjectif vert remonte aux adjectifs latins invariables du type verdis, grandis, fortis etc. En ancien français ce type d’adjectifs commence à s’accorder avec le substantif dans les groupes de mots libres. Mais en français moderne il reste des survivances des anciennes formes où l’adjectif reste invariable comme il l’était en latin. Citez quelques groupes de mots figés où l’adjectif grand ne s’accorde pas avec le substantif.

6. Uvrit les oilz, si li ad dit un mo : le passé simple alterne avec le passé composé.

7. parlerai, orrat – les formes du futur simple (parler, avoir).

8. Observez les cas de non-emploi du sujet et expliquez-les.

9. L’ordre des mots dans la proposition est-il encore libre?Analysez l’ordre des termes dans CLXIX et faites-en la conlusion.

Соседние файлы в предмете Французский язык