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a im a it e n c o re p lu s s o n in d e p e n d a n c e . A p a r - t i r d e 1 9 8 1 , i l s ’e s t b e a u c o u p m o q u e d e s s o - c ia lis te s d a n s ses « p a s tic h e s » d e L’Express — m a is a u p a ra v a n t, i l s ’e ta it b e a u c o u p m o q u e

a p re s J e s u s - C h ris t (Le Mauvais Choix). C ’e ta it q u e lq u ’u n q u i a im a it b ie n se m o q u e r d u m o n ­ d e , i l у a v a it m e m e d e s m o m e n ts o u j ’a va is

a v a n g a it m a s q u e , a la fo is p a r p o lite s s e , p a r e n ­

u n e e sp e ce de B e m a n o s p a ie n e t s o u r ia n t, q u i

o ra n g e p o u r p a y e r le d in e r a u r e s ta u ra n t. I I n e

te l q u i le c o n n a it d e p u is d ix a n s . N o u s n e n o u s d ir o n s p lu s a u r e v o ir d e v a n t le p o rc h e d e s o n im m e u b le . I l n e v e rr a p lu s le s q u a re B o u c ic a u t, l ’e g lis e S a in t- G e rm a in - d e s - P re s , la S e in e .

Je sa is q u e d a n s la v ie i l a f a it t o u t ce q u ’i l a v o u lu , q u a n d i l Г а v o u lu , c o m m e i l Г а v o u lu ,

Bibliographie

Jean-Louis Curtis est 1’auteur d’une trentaine d’ouvrages (romans, nouvelles, essais, pastiches, adaptations theatrales). La plupart sont disponibles en librairie, notamment

La France m’dpuise (Points Seuil), Le Mauvais Choix (Ftammarion), Un rien m’agite (Flammarion), Les Forets de la nuit (prix Goncourt 1947, reedite chez julliard), La Quarantaine (Le Rocher), Le Temple de I’amour (Flammarion), Un miroirle long du chemin (Le Rocher),

Le Comble du chic (Flammarion). Derniere parution : Le Monde comme il va, un recueil d’essais aux editions du Rocher.

Selon Mathilde Lemoine, directrice des etudes economiques de la strategie marches chez HSBC France, le coup de froid sur l’immobilier pourrait durer jusqu’en 2012 : une purge inevitable pour ce secteur.

montee rapide du niveau des stocks : en l’espace d’une annee, leur delai d’ecoulement est passe de 7,5 mois a 13,6 mois.

Est-ce la crise financiere qui est a I’origine de ce retournement ?

La chute des ventes immobilieres s’est acceleree ces demiers m ois: peut-on parler de krach ?

Pas pour le moment. Les economistes parlent de krach boursier lorsque les Bourses plongent de plus de 20%. Or dans l’immobilier, on n’en est pas la. Mais la chute de 34% des ventes enregistree dans le neuf au deuxieme trimestre (par rapport a la meme periode de 2007) indique l’ampleur de l’ajustement en cours, comparable a celui a 1’oeuvre en Espagne. Il existe toutefois une grande difference entre l’Espagne, les Etats-Unis et la France: contrairement aux deux premiers pays, nous avons chez nous un deficit de logements, que j’evalue a 400 unites. L’ajustement de notre marche devrait done etre pips rapide que chez nos voisins. Reste que, pour l’heure, la de­ gradation est brutale, comme en temoigne la

En realite, il etait anticipe bien avant: le gonflement de la bulle immobiliere avait deja entraine un recul de la solvabilite des menages. Des 2006, le marche avait atteint son point haut, puis il a commence a ralentir en 2007. Bien entendu, la crise financiere a accelere le processus, en se traduisant notamment par une augmentation des taux d’emprunt. Conse­ quence : avec des conditions de credit moins bonnes, mais parallelement, des prix toujours a la hausse, la degradation de la solvabilite des menages s’est nettement accentuee au cours de ces demiers mois. Selon nos indicateurs, les menages frangais ont perdu depuis un an plus de 10% de leur capacite d’achat dans l’immobilier residentiel. [... ]

Propos recueillis par Eric Choi

L’Express

Eux et nous. Eux contre nous. Alors que l’Amerique se demande qui est 1’ennemi qui lui voue une si terrible haine, certains pensent qu’on a assiste au premier acte du « choc des

civilisations » annonce en 1993 par le poli­ tologue americain Samuel Huntington. La guerre des cultures aurait commence. A pre­ miere vue, tout semble indiquer que son in-

quietant scenario se realise dans sa forme la plus apocalyptique : les avions fous du World Trade Center seraient la declaration de guerre de l’islam a l’Occident.

Dans cet ouvrage qui a fait grand bruit lors de sa publication, l’ancien conseiller deJimmy Carter, actuellement professeur a Harvard, estime que 1’affrontement ideologique de la guerre froide va ceder la place a des conflits bien plus dangereux : « Si le XIXе siecle a ete marquepar le conflit des Etats-nations et le XXе par 1’affrontement des ideologies, ecrit-il, le sie­ cle prochain verra le choc des civilisations, car lesfrontieres entre culture, religion et race sont desormais des lignes defracture. » Car les re­ ligions qui, selon lui, constituent le coeur des sept grandes civilisations qui se partagent le monde sont des forces bien plus menagantes, bien plus obscures que les ideologies. « La chute du communisme, resume-t-il, afait disparaitre Vennemi commun de VOccident et de I'islam, de sorte que chaque camp est desormais laprincipale menace de Vautre. » [...]

Pour Huntington, la cause est entendue. Attaque par des rivaux surs d’eux et mine de I’interieur par les multiculturalistes et autres

« separatistes ethnocentristes qui ne voient dans Vheritage occidental que les crimes de VOcci­ dent », celui-ci serait en plein declin.

Sur ce point, il est difficile de le suivre. En effet, si le mythe de I’invulnerabilite americaine est enterre sous la poussiere de Manhattan, jamais la puissance americaine n’a paru aussi demesuree, aussi depourvue de rivale que ces demieres annees. En revanche, les attaques du 11 septembre constituent peut-etre l’acte de naissance d’un hyperterrorisme, a la mesure de « Vhyperpuissance », selon l’expression de Hubert Vedrine. Et nul ne peut mesurer Tissue de ce combat. [...]

Pour autant, et meme si la piste Ben Laden est confirmee, faut-il accepter dans sa generalite l’idee d’un islam erige en ennemi ontologique ?

Tout d’abord, l’idee d’un monde partage entre de grandes civilisations semble a bien des egards depassee. Si une guerre a com­ mence a Wall Street, ce n’est peut-etre pas tant entre I’islam et l’Occident qu’entre le « monde unique » qui se met en place sous l’impulsion de l’uniformisation marchande et ses laisses- pour-compte, d’autant plus violents qu’ils sont desherites. D’ailleurs, Huntington lui-meme ne parle-t-il pas de la « culture de Davos » en reconnaissant que, meme au sein des pays ri­ ches, elle ne mobilise guere que les elites ?

La grille de lecture foumie par le politologue americain Benjamin Barber complete utilement celle de Samuel Huntington. Pour lui, en effet, le monde est livre a deux forces a la fois contradictoires et complementaires, aucune des deux n’etant prete a coexister avec l’autre, mais aucune ne pouvant vivre sans l’autre. D’un cote, McWorld, l’uniformisation marchande du monde sous la domination de marches eriges en referent absolu, nous offre un avenir « qui reunira tous lespays en un vaste pare a theme uniforme ». De l’autre, Djihad, resultante de « milliers de croyances bomees », qui nous promet « la balkanisation des Etatsnations ой Vonverrase dressertribu contre tribu, peuple contrepeuple, culture contre culture ».

Seulement, et la cle de l’epoque qui s’ouvre est sans doute la, Djihad et McWorld, loin de se combattre reellement, sont a l’oeuvre au meme endroit et au meme moment. La haine de la puissance americaine ne peut parfaitement se conjuguer avec une aspiration au mode de vie americain. « Une demi-douzaine dejeunes gens peuvent bien porter desjeans, boire du CocaCola, ecouter du rap et cependantfaire sauter un avion de ligne americain », reconnait-il.

Au lieu d’un affrontement entre islam et Occident, n’est-ce pas le sanglant manage de Djihad et de McWorld qui s’est joue dans le ciel de New York ?

D’apres Le Point

Nous tentons de repondre d’abord a la pre­ miere question, c’est-a-dire de preciser le caractere oligarchique des democraties mo-

dernes.

Pour commencer cette etude, je me refererais a une theorie que Ton appelle aujourd’hui la theorie machiavelienne et que l’on trouve exprimee dans de nombreux livres, le Traite de sociologie generate de Pareto, le livre de Mosca sur La Classe dirigeante ou encore le li­ vre de J. Burnham, intitule Les Machiaveliens. L’idee centrale de ces theoriciens, dans mon langage —mais c’est un langage qu’ils admettraient —, est que tout regime politique est oli­ garchique. Toutes les societes, diraient-ils, au moins toutes les societes complexes, sont gouvernees par un petit nombre d’hommes; les regimes varient selon le caractere de la minori­ te qui exerce Гautorite. Bien plus, a l’interieur meme des partis politiques, c’est encore une minorite qui gouverne. Le sociologue italien Robert Michels a ecrit un livre sur les partis politiques ou il a voulu demontrer et a demontre en effet que, dans la plupart des partis po­ litiques, des minorites detenaient les positions de puissance et les conservaient avec 1’approbation passive de la masse des militants.

Les regimes dits democratiques, ont explique les machiaveliens, sont en realite des oligarchies d’un type particulier, des oligar­ chies ploutocratiques. La minorite qui detient le pouvoir serait dominee par les riches, les financiers, les entrepreneurs, les industriels. Ces hommes n’aiment pas les moyens de force et preferent les moyens de ruse. Mais, au bout

du compte, la democratie serait tout apparente puisque des minorites, souvent dissimulees dans l’ombre, prendraient les decisions les plus importantes.

Certains des faits sur lesquels s’appuient les machiaveliens sont incontestables. Il est vrai que, dans toutes les societes, les decisions sont prises par un petit nombre d’hommes. Il est vrai aussi, que, dans les democraties modernes, l’oligarchie presente des caracteres ploutocratiques; les detenteurs des moyens de production, les riches, les financiers, exercent, directement ou indirectement, une influence sur ceux qui dirigent les affaires publiques.

A cette demonstration du caractere oligar­ chique des societes democratiques, il faut opposer non une objection mais un fait (que les machiaveliens acceptent eux-memes). On ne peutpas concevoir de regime qui, en un sens, ne sozYo%arc/zz^«e.L’essencememedelapolitique est que des decisions soient prises pour, non par, la collectivite. Les decisions ne sauraient etre prises par tous. La souverainete populaire ne signifie pas que la masse des citoyens prend elle-meme, directement, les decisions relatives aux finances publiques ou a la politique etrangёre. Il est absurde de comparer les regimes democratiques modernes a l’idee irrealisable d’un regime ou le peuple se gouvernerait luiтё те, il s’agit de comparer les regimes de fait aux regimes possibles. [...]

R. Aron

Democratie et totalitarisme.

Editions Gallimard, 1965

II est l’homme du fameux « Enrichissezvous ». Mais de celui qui gouverna la France on n’a retenu que des cliches. Notre collaborateur, l’historien Laurent Theis, raconte un esprit complexe, talentueux et fin stratege.

PAR MAX GALLO, DE L'ACADlMIE FRAN^AISE

De Franqois Guizot, figure majeure du pou­ voir durant le regne de Louis-Philippe (1830-1848), on ne connait que la caricature. Il serait l’homme froid —un calviniste —lanqant

un cynique « Enrichissez-vous » aux deja nantis. Il serait le ministre (de llnterieur, de l’lnstruction publique, des Affaires etrangeres), le president du Conseil (1846-1848) deteste par les Frangais. Tocqueville note qu’il у a une « incompatiblite d’humeur entre la France etM. Gui­ zot. Ilsuffit qu’ilaborde une mesurepour le rendre impopulaire ». En fevrier 1848, les manifestants, bientot les insurges, crient « Vive la гфгте, a has Guizot! » puis «A mort Guizot!». Et il est oblige de fuir a Londres deguise en femme.

Cette fin politique n’etonne pas ses adversaires. Ils l’accusent depuis longtemps d’avoir, en 1814, rendu visite a Louis ХУШa Gand et d’avoir eteinstallecommehaut fonctionnairedel’lnterieur par un escadron de Cosaquds. Il est done rentre en France dans les fourgons de l’etranger et a l’occasiondeladefaitede lanation. Iln’est ni republicain ni patriote. Et on lui lance: « Vousn’avezpas lesens national»Initiateur de l’Entente cordiale,« ilparlerait le langage d’un Anglais » selon Ledru-Rollin. Caricature ou verite ?

Pour retrouver la complexite de l’homme Guizot, rappeler ses talents, son energie, de­ terminer ses mobiles, analyser sa remarquable ceuvre d’historien, il fallait une longue familiarite avec le personnage, une intelligence aigud du XIXе siecle et l’ouverture d’esprit qui permet, au-dela des simplifications, de cemer la verite d’un homme. Laurent Theis, dans un livre dense et clair, nous rend un Guizot vivant, nous permet de comprendre pourquoi ce protestant de Nimes, fils d’un guillotine de 1794, domina durant deux decennies la vie politique frangaise. Et Guizot, ne en 1787, eleve a Geneve, chasse de la vie politique en 1848, est encore en 1874 —l’annee de sa mort a 86 ans —l’auteur du quatrieme tome d’une « Histoire de France racontee a mes petits-enfants » qui est un im­ mense succes de librairie. II a done accompagne trois generations:celles de 1789 et de 1814, cel­ le de 1848. Il nous conduit de l’Ancien Regime a la IIIе Republique. Et, sous la plume savante et nuancee de Laurent Theis, Guizot devient 1’incarnation, l’expression des contradictions que les hommes de ces generations vivent.

Esprit superieur. Guizot, malgre son sejour a Geneve, n’est pas un emigre. Mais un « minoritaire » car, bien qu’il exalte l’orthodoxie chretienne, 0 reste calviniste. Fils d’une victime de la Revolution, il ne partidpe pas a la geste napo-

leonienne ou republicaine. Mais il est un opposant determine de la Restauration conduite par la Chambre introuvable et Charles X.

En 1830, il accede naturellement au pouvoir avec Louis-Philippe. Il est partisan de la monarchie constitutionnelle : pour l’ordre, la loi, le suffrage censitaire (200 000 electeurs), une monarchie eclairee, un parlementarisme dirige. Et, dans ce cadre, il accepte avec une sorte de hautaine satisfaction intellectuelle l’impopularite. Il dit en 1831, alors que l’emeute gronde encore : « Les gouvemements ne sont pas institues pour plaire. On a vu des gouvemements despotiques et populaires. Dans les pays libres, le meilleur gouvernement n ’est presquejamaispopulaire. Il a toujours centre lui le parti des esperances et celui des mecomptes. Le parti des illusions deques est precisement la portion de la societe la plus remuante; c’est as­ sezpour rendre lepouvoir impopulaire тёте au moment ou il rend le plus de service au pays. »

Cette analyse n’est pas caricaturale. Mais elle revele que Guizot, esprit superieur, homme integre, n’imagine meme pas pouvoir faire fausse route. L’impopularite devient preuve de pertinence et de vertu. Il n’est pire piege narcissique pour un homme d’Etat.

Le Point

n 1989, il у eut Francis Fukuyama, augure naif de la « fin de l’Histoire ». Desormais, il у a Samuel Huntington, prophete sombre de la guerre qui vient. Ce professeur a Harvard, specialiste reconnu des relations internationales, n’y est pas alle de main morte: dans un article explosif, il annonce l’inevitable et effrayant « choc des civi­ lisations ». Son texte a fait grand bruit, d’abord aux Etats-Unis, puis, tres vite dans le monde arabo-musulman ou les plus extremistes у ont peche une justification de leur guerre sainte anti-occidentale: puisqu’un eminent profes­ seur occidental prevoit la guerre entre les civi­ lisations, ont conclu les islamistes, nous avons

raison de declencher le djihad !

Des conflits entre les tribus, rappelle Huntington, on est passe au fil des siecles a la « guerre des rois » puis a celle des nations et des peuples, pour aboutir a la melee feroce des conflits ideologiques. Mais tout cela n’aurait ete qu’amuse-gueule puisque le XXIе siecle sera, selon l’expert americain, celui d’un affrontement plus titanesque entre les civili­ sations, notamment entre un Occident legerement avachi et un monde « islamo-confuceen » de plus en plus agressif. Jusqu’a present, nous n’avions connu que « des guerres civiles occidentales ». Desormais, les hostilites opposeront l’Occident au reste du monde et, explique le professeur, « laprochaine guerre mondiale, s’il yen a une, sera une guerre entre civilisations ».

Quelles sont ces civilisations ? L’auteur en denombre «sept ou huit majeures » : occiden­ ta l, confuceenne, japonaise, islamique, hindouiste, slavo-orthodoxe, latino-americaine et, «peut-etre africaine ». Leurs chocs a venir, predit-il, domineront la politique mondiale. «• Les lignes defracture entre civilisations seront les lignes defront de Vavenir », elles remplace-

ront « lesfrontieres politiques et ideologiques de la guerrefroide en tant que sources de crises et de conflits sanglants ». Huntington ne croit guere a 1’universalite des valeurs occidentales.

«Les concepts occidentaux differentfondamentalement de ceux qui prevalent dans les autres civilisations, soutient-il. Les idees occidenta­ les que sont Vindividualisme, le liberalisme, le

«constitutionnalisme », les droits de Vhomme, Vegalite, la liberte, le r'egne de la loi, la democratie, le libre marche, la separation de VEglise et de I’Etat rencontrent souvent peu d’echo dans les cultures musulmanes, confuceennes » et autres, qui aspirent certes a se moderniser, mais « sans s’occidentaliser ». L’affrontement Islam-Occident est le plus previsible, le plus visible. D’ailleurs, il « dure depuis mille trois cents ans », argumente Huntington, et il est

«improbable que ce conflit seculaire s’apaise:il pourra.it meme gagner en virulence » car, « dans le monde arabe, la democratie occidentale ren-

force les courants politiques anti-occidentaux. [...] De part et d’autre, le conflit entre I’Islam et VOccident est vu comme un choc de civilisa­ tions ».

Huntington decele aussi la constitution d’un redoutable axe islamo-confuceen, reunissant les plus agressifs des pays musulmans (Iran, Irak, Syrie, Pakistan, Libye, etc.) et les puissances emergentes de l’Asie, avec la Chine a leur tete. Ces pays, explique-t-il, ont cree une connexion militaire « dont Vobjectifest de permettre a ses membres d’acquerir les armes et les technologies d’armement pour contrer la puissance militaire de VOccident ». Ainsi la Chine a-t-elle foumi des technologies nucleaires a l’lran et a l’Algerie. Une nouvelle course aux armements est engage entre ces pays et l’Occident. Done, conclut l’auteur, « I’opposition entre VOccident et plusieurs Etats islamo-

C h a p i t r e IV.

confuceens sera la pricipale source de conflits dans Vavenir immediat ». La guerre Occident contre Orient est a l’affiche. Cette these a, bien sur, immediatement provoque de vives polemiques. On a discute le concept de civilisation, reducteur et attrape-tout, qui sert ici de moteur unique de l’Histoire (comme le furent la lutte des classes ou la main invisible du marche) et qui ne parvient plus a rendre compte d’un monde complexe et irreductible aux grandes simplifications. Mais cette prophetie,

C o m p t e r e n d u

avec sa dimension paranoiaque, a deja produit des effets. Et pas les meilleurs. Elle a conforte les fanatiques qui souhaitent ce « choc des ci­ vilisations ». Ainsi, en pretendant denoncer un mal, on risque encore une fois de le rendre inevitable. On voudrait susciter un conflit en­ tre l’Occident et les autres civilisations qu’on ne s’y prendrait pas autrement!

B. Poulet

L’Evenement dujeudi

epartons de l’auteur et du texte qui, R dans l’histoire de la pensee occidentale, a joue le role le plus solennel et le plus constant. La Politique d’Aristote a ete pendant des siecles, simultanement la philisophie po­ litique et la sociologie politique. Ce livre ve­ nerable, encore aujourd’hui digne d’une etude approfondie, ne comporte pas simplement des jugements de valeur, mais aussi une analyse extremement poussee des faits. Aristote avait reuni une abondante documentation sur les constitutions des cites grecques, il avait essaye de decrire ces constitutions (non pas au sens moderne du mot constitution, texte ecrit, mais au sens du mot regime), d’analyser la maniere dont fonctionnaient les regimes des cites grec­ ques. C’est a partir de cette etude comparative qu’il avait etabli la classification celebre des trois regimes fondamentaux: le regime monarchique ou le pouvoir souverain appartient a un seul, le regime oligarchique ой le pouvoir souverain appartient a plusieurs, le regime democratique ou le pouvoir souverain appar­ tient a tous les citoyens. A cette classification il ajoutait 1’antithese des formes saines et des formes corrompues, et enfin il etudiait les re­

gimes mixtes.

Une enquete de cet ordre est, au sens actuel du mot, sociologique. En particulier, un chapitre apparait encore modele d’analyse so­ ciologique, celui qui est consacre aux revolu­ tions. Rien n’interessait plus Aristote que les deux questions : comment un regime se main- tient-il ? comment un regime se transforme-t- il ou est-il renverse ? Il appartient au savant de donner des conseils aux hommes d’Etat. La Politique fournit aux gouvernants de chaque regime des conseils sur la meilleure maniere de conserver le regime existant. Dans le court chapitre ой Aristote indique aux tyrans la maniere de sauvegarder la tyrannie, on peut trouver l’anticipation d’un ouvrage celebre, Le Prince de Machiavel. Un regime tyrannique etant un regime mauvais, les moyens necessaires pour le maintenir ressembleront au regime meme, c’est-a-dire qu’ils seront detestables, contraires a la moralite.

La Politique d’Aristote n’est pas simple­ ment une sociologie, elle est aussi une philosophie. L’etude des differents regimes, de leur fonctionnement, des manieres de les mainte­ nir et de la fagon dont ils sont renverses est orientee vers une question fondamentale qui, elle, est une question philosophique, a savoir: