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L'Ultime Secret.doc
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19.08.2019
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Il se souvient du jour où Sammy a subi la même opération.

La différence, c'est que cet Isidore Katzenberg n'est pas du tout enthousiaste. Tous les pensionnaires de l'hôpital rêvaient de cette opération, j'ai tout préparé pour lancer la deuxième «fusée» et il sera le seul à ne pas souhaiter cette récompense. Ainsi va la vie. Il suffit qu'on ne désiré pas quelque chose pour qu'on vous l'offre...

Lucrèce est présente, attachée à un fauteuil. Pour la faire taire, on lui colle un sparadrap sur la bouche,

Couchent-ils ensemble? se demande Jean-Louis Martin. De toute façon, après l'opération aucune femme ne pourra lui appor­ter autant de plaisir que l'Ultime Secret. Il me suffira de lancer le signal et, dans sa tête, explosera une bombe.

Jean-Louis Martin est installé en position assise, le dossier de son lit relevé. Ainsi, il voit mieux la scène.

Lucrèce se débat dans ses liens.

Elle est vraiment mignonne. Et puis si dynamique. Nous aurions peur-être été mieux inspirés en la choisissant. Dans la mythologie grecque, il paraît que le dieu envoyé par Zeus pour lui dire s'il valait mieux être une femme ou un homme est resté une journée dans la peau de chacun des deux sexes. Au retour il a annoncé qu'il préférait être une femme parce que le plaisir des femmes est neuf fois supérieur à celui des hommes.

Jean-Louis Martin décide que la prochaine «cobaye» sera féminine.

Pourquoi pas Lucrèce, d'ailleurs? Quand elle constatera à quel point son compagnon est heureux après l'opération, elle aura probablement envie de goûter elle aussi à cet absolu.

Natacha Andersen-Tchernienko tend les instruments chirurgicaux à sa mère. Elle enferme le crâne d'Isidore dans un cerclage de métal nanti de plusieurs arcs formant une cou­ronne d'acier remplie de vis autour de la tête du journaliste scientifique.

Maintenant, le docteur Tchernienko imprègne la zone qu'elle va ouvrir d'un peu d'anesthésiant cutané. Elle met la perceuse électrique en marche. La mèche approche du cuir chevelu. Isidore ferme les yeux.

143.

Ne penser à rien, pense-t-il.

144.

Le système d'alarme résonne soudain, strident. Quelqu'un s'est introduit dans l'hôpital.

Les lumières rouges d'alerte clignotent. Le docteur Tcher­nienko s'immobilise, indécise.

Jean-Louis Martin ordonne sur l'écran: «Continuez!» La perceuse est réactivée et s'approche encore plus près du crâne d'Isidore Katzenberg. Elle frôle la peau quand la porte s'ouvre d'un coup et Umberto fait irruption, revolver au poing. Il met tout le monde en joue.

— J'arrive à temps! s'exclame le marin du Charon.

Rapidement il détache Isidore. Celui-ci, à son tour, va s'occuper de sa comparse ligotée. Elle marmonne avec véhémence, derrière le sparadrap. Pour la comprendre, il le lui enlève d'un coup sec.

— Qu'essayiez-vous de me dire? demande Isidore.

— J'étais en train de vous prévenir: Ne m'arrachez pas d'un coup sec le sparadrap, ça fait très mal, répond-elle avec irritation.

Le capitaine du Charon fait signe à Natacha et à sa mère de reculer.

«Umberto, comme je suis heureux de vous revoir» s'ins­crit sur l'écran de Jean-Louis Martin.

— Vous connaissez m6n nom? Je ne vous ai pourtant jamais rencontré! s'étonne le marin, brandissant toujours son arme.

«Mais si. Rappelez-vous. Un soir d'hiver. Vous étiez au volant d'une voiture. Vous aviez peut-être un peu bu. Ou vous vous étiez assoupi.»

Umberto fronce ses gros sourcils.

«Vous avez perdu le contrôle de votre véhicule et vous avez fauché un piéton.»

Le marin s'arrête, troublé.

«Le piéton, c'était moi. Et si je suis dans cet état aujour­d'hui, c'est à cause de vous. Sans votre irruption dans mon existence, je serais auprès de ma famille et de mes amis en train de profiter d'une vie normale.»

Le capitaine Umberto considère le gisant, comme assommé soudain par le remords et la culpabilité. Lucrèce note dans son esprit de rajouter à sa liste: le pouvoir de la culpabilité.

— Je... je..., bafouille Umberto, lâchant presque son revol­ver. Non. Ce n'est pas possible. Celui que j'ai renversé ne bougeait plus. Vu le choc, le type était forcément mort.

L'écran écrit d'une manière fluide, alors que l'œil rouge fixe: «Le système nerveux périphérique est hors d'état, mais le cerveau fonctionne toujours. On appelle cela LIS, pour Locked-In Syndrome. Vous devez connaître, docteur. C'est joli comme nom. On dirait un nom de fleur, n'est-ce pas? En français: Syndrome de l'Emmuré Vivant.»

Umberto recule.

—Comment savez-vous que c'est moi?

«Quand on ne peut bouger, on s'ennuie. Et quand on s'ennuie trop, on s'occupe. Je me suis occupé à plein de cho­ses. Entre autres, je voulais savoir à qui je devais cet "inci­dent". Et j'ai trouvé. Je vous le dois, mon cher Umberto. Au début, j'ai eu envie de vous tuer. J'ai dépassé cet objectif. La vengeance m'inondait le cerveau comme un acide rongeur. Et puis quand j'ai appris que vous aviez sombré dans l'alcool, je me suis dit que la vie m'avait mieux vengé que je n'aurais pu le faire. Moi, au moins, je conservais ma propre estime. Alors que vous... Vous aviez juste assez de recul pour souffrir de votre perte de conscience. J'ai été heureux de vous voir dans cet état. Je vous haïssais tant. Et j'ai voulu surmonter ma haine. J'ai demandé à Fincher de vous engager comme marin-taxi. Vous êtes le bourreau et vous avez été sauvé par votre victime. Sachez-le.»

Dans l'esprit d'Umberto, les idées courent dans tous les sens, entre culpabilité, reconnaissance, regret. Les autres n'osent intervenir. Umberto change de physionomie, adopte une expression déterminée et se tourne vers Lucrèce et Isidore:

— Laissez-le tranquille! clame-t-il avec force. Il a suffisam­ment souffert. Vous rendez-vous compte du calvaire de cet homme?

— Umberto, pensez à Fincher, tente Isidore. Cet homme a tué Fincher, l'homme auquel vous devez tout.

L'ancien neurochirurgien se tourne lentement vers eux.

— C'est lui qui a demandé à Fincher de me sauver! J'ai détruit sa vie. Non seulement il m'a pardonné mais il m'a sauvé. Je ne peux pas lui faire à nouveau du mal.

Merci, Athéna, je n'aurais jamais cru assister au pouvoir du pardon. Tu as raison, le pardon est une force... du futur.

Umberto détourne le revolver. Toutes les motivations s'affrontent dans son esprit: la sympathie envers Lucrèce et Isidore, la compassion pour Jean-Louis Martin qu'il a trans­formé en handicapé et qui, en retour, l'a préservé de la déchéance. Le combat est terrible.

— Je n'arrive pas à me décider. Je n'arrive pas à me décider! glapit-il.

Il s'assoit, le regard vide, et ne bouge plus.

Lucrèce récupère prestement le revolver. Isidore se penche.

— Qu'est-ce qu'il a?

Le docteur Tchernienko l'observe avec intérêt.

— C'est un cas rare: son cerveau est arrivé à un équilibre parfait entre toutes ses motivations, alors il ne peut plus bouger.

— Cet état va durer longtemps?

La chirurgienne scrute sa pupille.

— Il ne peut pas gérer ce dilemme, alors il a démissionné.

Il s'est enfui de son corps.

Profitant du flottement, Natacha bondit et désarme Lucrèce. Les deux filles se battent. Natacha, beaucoup plus grande que la journaliste, compense ainsi son peu d'expérience du close-combat. Elle donne des gifles, griffe, lance des coups de pied dans les tibias, secoue la tête comme une furie. Lucrèce, surprise, encaisse quelques coups, puis la contourne et lui tord le bras pour la calmer. Mais l'autre, qui ne sent pas la douleur, force encore plus sur son bras ce qui lui permet de se dégager.

Les deux femmes agrippent le pistolet. Les autres se pla­quent au sol quand le canon de l'arme les vise.

La lutte est âpre.

Le revolver balaye la pièce.

Lucrèce se souvient que ce n'est pas la lance qui tue le bison mais la volonté du chasseur. Le bison accepte la mort, la lance ne fait qu'officialiser son consentement. Dès le moment où la victime a accepté de perdre et le chasseur accepté de gagner, la lance peut être projetée n'importe où, elle finira par toucher sa cible. La pensée est plus détermi­nante que l'acte.

Soudain un coup part. Le revolver tombe par terre.

Lucrèce et Natacha se dévisagent puis s'examinent à la recherche d'une blessure...

Umberto est toujours immobile. C'est finalement un râle de douleur qui permet d'identifier la cible du projectile. Le docteur Tchernienko est touchée à l'épaule.

Natacha se précipite.

— Maman!

C'est finalement elle qui a accepté la balle, pense Lucrèce.

— Ma petite maman. NON. Qu'ai-je fait!

D'abord le top model pleure. Puis elle rit. Elle s'étonne, se palpe.

— Maman, ça y est, je souffre! Je suis guérie, encore grâce à toi!

Elle se passe un doigt sous l'œil.

— Je pleure!

— J'ai mal, dit le docteur Tchernienko.

Profitant de la panique générale, Lucrèce décroche le téléphone de la salle d'opération et appelle Jérôme Bergerac.

— Allô, si vous voulez toujours être un héros, envoyez le Samu et la cavalerie ici, il y a de l'aventure pour vous.

Sans que personne y prenne garde, une forme oblongue sort de sous le meuble recouvert de tissu, et rampe. Elle ramasse le revolver et tient en joue les journalistes.

«Haut les mains!» s'inscrit sur l'écran qui surplombe l'or­dinateur.

Les deux journalistes hésitent mais, considérant le danger, s'exécutent.

En se soulevant, le bras mécanique entraîne le drap blanc qui révèle maintenant un gros cube marqué de l'inscription en caractères gothiques: «Deep Blue IV»

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