Métro – boulot – fourneau. Une femme active avec un enfant travaille 70 heures par semaine contre 59 pour un homme. Les superfemmes sont fatiguées.

Mères, épouses, femmes actives… elles remplissent tous les rôles et sont tous les fronts. A les voir ainsi courir le matin de l'école des enfants à leur entreprise, à les voir jongler entre les courses, les inscriptions au judo et les rendez-vous chez le pédiatre, sociologues et médecins se demandent : comment font-elles ? Elles aussi commencent à se poser la question.

Car les voilà qui se rendent compte soudain qu'elles se trouvent prises au coeur d'un tourbillon de rôles conflictuels, victimes des effets pervers de vingt ans de militantisme : elles ont conquis toutes les citadelles professionnelles occupées jusque-là par les hommes. Mais ceux-ci n'ont pas su, ou pas voulu, faire le chemin inverse et les remplacer – un per – dans leurs tâches domestiques.

Victimes, aussi, d'un illusion d'optique, ou plutôt d'une illusion médiatique. On les voit partout, en effet. Ces dernières années, la publicité comme les journaux féminins ont largement encouragé – sinon exhorté – les femmes à développer les " mille facettes de leur personnalité" . On s'est dopé de formules et de slogans. […]

Mais ces " femmes pressées" , qui sont-elles ? Soixante-dix pour cent de femmes actives, qui sont mères d'au moins un enfant. Parmi elles, le C.C.A. (Centre de communication avancée) recense 14 % d'" activistes"  ou " femmes à carrières" . Ces mutantes ont entre 30 et 40 ans, ellesn sont ambitieuses ; les plus souvent mariées, mères et débordées, et disposent d'une importante autonomie financière.

Or, malgré, ces bouleversement par rapport à la génération de leurs mères, rien de nouveau sous l'abat-jour. Les statistiques de l'I.N.S.E.E. le montrent. Aux rôles traditionnels des femmes se sont simplement greffées les exigences modernes : mener une carrière " épanouissante" , prendre soin de son corps, cultiver son esprit… Rien d'étonnant, donc, si les médecins généralistes voient affluer dans leurs cabinets des femmes surmenées, don’t certaines commencent à rejeter le modèle de " superfemme active" . […]

Il y a quelques années, les " nouveaux hommes"  comme les " nouveaux pères"  faisaient la une des magazines. Mais les statistiques montrent que seul un mince pourcentage de jeunes pères entre 20 et 30 ans répond à ces critères. […]

[Leur] contribution aux tâches ménagères, l'I.N.S.E.E. l'a récemment mésurée. Et même chronométrée. Conclusions ? Depuis 1975, le temps consacré par les hommes à la maison a augmenté de 20 minutes, et celui des femmes a diminué de… 3 minutes. Mince progrès. L'I.N.S.E.E. a également montré que les femmes cumulent deux journées dans une. Un exemple : une femme active ayant au moins un enfant consacre chaque semaiune au " travail domestique"  (de la cuisine au ménage en passant par les courses et les soins aux enfants) 36 h 20 mn, contre 57 h 55 mn pour une femme au foyer. A quoi s'ajoutent 34 h 15 mn de travail professionnel. Des semaine de 70 heures. Dans le même temps, toujours selon l'I.N.S.E.E., un homme aura travaillé 59 heures au total, don’t seulement 13 consacrées essentiellement à des activités domestiques de " rangement"  et " jardinage" .

Bien des hommes, aujourd'hui, affirment faire, de temps à autre, la vaisselle et la cuisine. En chiffres, cela donne 2 h 25 mn par semaine pour les hommeas, contre 11 h 35 mn pour les femmes. Quant au ménage et à la lessive, les femmes actives y consacrent 9 heures, tandis que les hommes y passent à peine 45 minutes par semaine. Autres chiffres : la lecture occupe les femmes 1 h 30 mn contre 3 h 10 mn pour les hommes.

La situation est la plus difficile, bien sûr, dans les classes moyennes, où les femmes ne bénéficient pas d'aide ménagère. Elles s'épuisent en repassage et en courses dans les supermarchés ouverts pour elles jusqu'à 22 heures. […]

Reste que l'on observe chez une majorité de " superfemmes"  une véritable incapacité à déléguer leur pouvoir de mère et de régente. Une forme de narcissisme ? […] Crainte ancestrale, aussi, de perdre un peu de leur identité séculaire de gardiennes du foyer. […]

Il faut ajouter à tout cela les failles des pouvoirs publics, qui réclament des enfants pour la France, mais ne parviennet pas à créer des crèches en nombre suffisant. Obtenir une place relévé du parcours du combattant. S'y prendre à l'avance, dès l'annonce de la grossesse, ne garantit rien. A Paris, cette année, 35,000 jeunes couples se sont vu refuser une place pour leur enfant. On recense en France 300,000 places dans les crèches. Or, les enfants de 0 à 3 ans don’t les mères travaillent sont au nombre de 1 million. Le travail à temps partiel ? Il représente à peine 10 % des emplois salariés, et n'a trouvé sa place que dans la fonction politique.

Résultat : les " superfemmes"  sont débordées. Mais rares sont elles qui, selon l'expression de Christianne Collange, voudraient " rentrer à la maison" . Elles ne reviennent pas non plus sur les acquis du féminisme, mais elles rejettent en bloc l'agressivité de leurs prophétesses : 64 % selon un sondage Sofres-Clair Foyer, estiment que la condition des femmes s'est améliorée, mais qu'il reste beaucoup à faire. […]

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