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3. La grammaire de Jacques Dubois. In linguam gallicam isagoge

Jacques Dubois ( 1478 – 1555 ), plus connu sous son nom latin de Silvius Ambianus, était médecin, comme presque tous les savants de son époque. Et comme tous les savants, il se servait du latin pour professer son métier. Il est donc surprenant, à première vue, qu’il ait eu l’idée de composer la grammaire d’un idiome, dont il n’a jamais voulu se servir. Nous trouvons l’explication de son acte dans un court avant–propos de sa grammaire, où Dubois dit les motifs qui l’ont décidé à écrire cet ouvrage. Il avoue qu’ “il est honteux qu’un homme paraisse étranger dans sa langue maternelle; si les hommes diffèrent des animaux par la parole, c’est par la politesse du langage qu’ils diffèrent entre eu”. Voilà pourquoi il a entrepris de donner à la langue française ses premières règles et d’allumer le flambeau pour la postériorité, qui, éclairée par lui, pourra faire mieux”. [Livet, p.3]

La grammaire de Dubois est le premier ouvrage écrit et imprimé en France. Elle parut en 1532 chez Robert Estienne, imprimeur et linguiste, sous le titre : Jacobi Sylvii Ambia. In linguam Gallicam Isagoge (...). La grammaire est écrite en latin, et Dubois explique ceci par son désir de se faire comprendre par tous les étrangers qui s’intéressent au français. L’oeuvre est dédiée à Eléonore (d’Autriche), reine de France.

J. Dubois était convaincu que “la langue française, en apparence gâtée et incohérente, est simple et pure : elle peut se lire et se comprendre presque avec la même exactitude, la même précision, la même brièveté et la même facilité que les écrits les plus corrects, les plus purs et les mieux ordonnés de la latinité” [Brunot, T.2. p.134]

Étant persuadé que le français vient du latin déformé, il s’est posé pour but de restituer cet état initial du français. “J’aurai, dit-il, réalisé mon désir, si l’éclat naїf de la langue française, depuis longtemps presque détruit et terni par la rouille, se trouve quelque peu ravivé, et si, faisant une sorte de retour à son point de départ, elle recouvre une partie de sa pureté primitive, par le moyen des recherches que j’aurai faites de l’origine de ses mots dans l’hébreu, le grec et le latin, sources d’où notre parler est venu presque tout entier” [Brunot, T.2., p.137]

L’auteur propose au commencement de sa grammaire de réformer l’orthographe du français. Par exemple, il propose de remplacer la lettre “c” en “ch” comme dans “ceval” – “cheval”; “c” en “s” comme dans “poincer” – “poinser”; “u” en “o” comme dans “pronuntiaire” – “prononcer”. Il réclame deux signes différents pour distinguer les lettres “i” et “j”; “v” et “u”.

Pour différencier la prononciation des sons représentés par le même signe graphique, il introduit les accents, les trémas, le cédille. Ce dernier était d’abord représenté par le “s” qui se mettait au-dessus du “c”. Tous ces changements graphiques et phonétiques sont présentés dans la grammaire sous forme de tableaux.

L’ouvrage de Sylvius comprend deux parties : l’introduction( pp.1-90)et la grammaire. (pp.90-159).

L’introduction n’est autre chose qu’un traité étymologique. L’auteur étudie la nature des lettres, leur parenté mutuelle qui leur permet d’être changées les unes pour les autres, donne toute une étude des diphtongues français, explique les lois phonétiques causant les modifications de la prononciation, formule les règles de la bonne prononciation. Par exemple, il dit “qu’à la fin des mots on ne prononce aucune consonne, à moins qu’une voyelle ne suive, ou que la phrase ne soit terminée” [Livet, p.29].

Dans la deuxième partie de sa grammaire Dubois traite des huit parties du discours. Il compte en français, comme en latin, 8 parties du discours: nom, pronom, verbe, adverbe, participe, conjonction, préposition et interjection. L’adjectif est réuni au nom et tous les déterminatifs, y compris l’article, sont rapportés aux pronoms.

Jacques Dubois, de même que Palsgrave, examine chaque partie du discours comme le siège d’un certain nombre d’accidents. Le nom en a sept dans sa grammaire. Ce sont :

  1. La qualité – l’existence des noms propres et des noms communs.

  2. Le nombre – singulier et pluriel qui se fait à l’aide de “s”

  3. Le genre. J. Dubois attribue à chaque nom deux genres : féminin et masculin. Par exemple: une espée – mon épée.

  4. La comparaison. Cet accident est prêté aux adjectifs. Le savant distingue trois degrés de comparaison.

  5. La déclinaison, qui se fait à l’aide des particules le, la, les + prépositions “à” ou “de”. Ainsi l’article est interprété dans la grammaire comme particule.

  6. Le cas. D’après Dubois, les cas en français n’ont qu’une terminaison, mais il faut les reconnaître à cause de la déclinaison.

  7. La figure qui permet de différencier les mots simples (ami) des mots composés (ennemi).

J.Dubois pratique un premier classement lexico sémantique des noms. Il les subdivise en treize espèces: collectif (peuple), relatif (fils), indéfini (qui), partitif (autre), factice (bonbon), numéral (un, premier), verbal (docteur) et autres.

Les défauts de ce classement sont visibles, vu que le grammairien intègre au nom différentes unités de caractère non substantiel.

Le verbe est étudié dans la grammaire de J.Dubois du point de vue de sept accidents. Ce sont en particulier :

  1. La qualité. Ce terme comprend deux éléments entièrement distincts : d’une part, il désigne les modes verbaux, et de l’autre, il sert à qualifier la nature du verbe, qui peut se présenter comme primitif (lire) ou dérivé (relire). Quant aux modes, Dubois les identifie au latin, c’est-à-dire, il distingue l’indicatif, l’impératif, l’optatif, le conjonctif et l’infinitif.

  2. Le genre. Ce terme est aussi ambigu. D’une part, il fait connaître le sexe des noms (écrit – écrite), d’autre part, il indique la voix verbale, qui peut être active, passive ou neutre. Les verbes actifs, dit Dubois, agissent hors d’eux; les verbes passifs sont rendus par le verbe “être” et le participe passé; les verbes neutres ont par eux-mêmes un sens complet et ne marquent ni l’action d’un autre sur nous, ni notre action sur un autre. Par exemple : Je respire.

  3. Le nombre. Il y en a deux dans la nature du verbe français – singulier et pluriel.

  4. La figure. Les verbes peuvent être simple (Je lis) et composé (Je relis).

  5. Le temps. Le savant identifie les temps verbaux français aux temps latins, c’est-à-dire, il distingue trois temps d’infectum : présent (amo, aime ), passé (amabam, aimais), futur (amabo, aimerai) et trois temps de perfectum : perfectum (amavi,aimai), plusquamperfectum (amaveram, avais aimé), futurum II (amavero, aurais aimé)

  6. La personne: Le verbe en a trois.

7.Conjugaison. Le savant distingue quatre types de conjugaison : I – er; II – oir; III – re; IV – ir.

Pronom. Parlant des pronoms, J. Dubois examine : 1) leurs qualités (pronoms définis et indéfinis), 2) leur genre (féminin, masculin), 3) leur figure (simples et composés, type : c’est, c’est-il), 4) la personne (il y en a trois), 4) les cas et 5) la déclinaison. A son avis, le pronom “leur” est au génétif et pas au datif.

Dans les chapitres que J.Dubois consacre à toutes les autres parties du discours il se borne à trouver des équivalences avec les notions correspondantes latines, parce qu’il cherche dans le latin le type d’où est sorti le français et dont il doit se rapprocher. Son idéal était de composer une grammaire qui serait la moins irrégulière possible par rapport au latin. Les formes françaises qui sont identiques aux formes latines sont considérées par Dubois comme vraies et toutes les autres sont tenues pour des inventions des Français, que les grammairiens doivent restituer en conformité avec les formes vraies.

Appréciant l’oeuvre de J. Dubois F. Brunot écrit : “La grammaire de Dubois n’est pas une grammaire française : c’est une grammaire latino française, ce qui ne veut dire ni grammaire du français rédigée en latin, ni grammaire simultanée du latin et du français, mais, si je comprends bien, grammaire du français rapporté au latin” [ T.2, p.135].

Le mérite de l’ouvrage de Dubois consiste en ce qu’il fonde les études étymologiques. Et sa grammaire est une grammaire étymologique. ”C’est de ce point de vue, dit F. Brunot, qu’il faut la comprendre et la juger” [ T.2, p.135].