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умк Лексикология.doc
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§ 23. Les emprunts. Considérations générales

Nous savons déjà qu’au IX-e siècle le latin populaire parlé en Gaule est arrivé à un tel degré d’évolution, qu’on peut le considérer comme une langue nouvelle, première étape vers la langue française. Nous savons aussi que le français a continué à évoluer et à recevoir des mots nouveaux, même apreès s’être affranchi des caractères essentiels du latin et après avoir acquis lea traits fondamentaux d’une langue romane particulière. Les linguistes sont d’accord à considérer comme sources tous les mots entrés dans le français jusqu’au IX-e siècle et comme emprunts les mots qui y sont entrés plus tard.

Les emprunts constituent une des plus importantes voies d’enrichissement du vocabulaire. C’est pourquoi, avant d’aborder la question des différentes langues auxquelles le français a pris des mots, il faut préciser la signification et la portée du mot “emprunt”.

En général, on considère commé emprunts seulement les mots empruntés et, en effet, c’est le cas le plus fréquent. Mais on peut emprunter aussi des significations: sous l’influence d’une langue étrangère, on ajoute de nouvelles significations aux mots déjà existants dans la langue. Ce sont les emprunts sémantiques.

Par exemple, il y a en français le verbe composer, qui signifie en général “former un tout en assemblant différentes parties”. Sous l’influence du verbe anglais to compose, qui a le sens de “calmer, arranger, apaiser”, le verbe français a acquis une signification nouvelle, “se prêter à un arrangement”, comme dans la phrase: “Ils sont à court d’argent et la nécessité les amènera à composer” (“l’Humanité”, 4 avril 1962). De mêne, sous l’influence des verbes anglais correspondants, le verbe réaliser est souvent employé au sens de “concevoir, comprendre’, le verbe ignorer a reçu la signification de “negliger”, contrôler signifie aussi “dominer”. Par exemple: “On ne tarde pas à réaliser l’ampleur de ce sinistre”, “ La presse occidentale est contrôlée par les financiers”.

Une forme spéciale des emprunts sont les calques, procédé qui consiste à reproduire la forme interne d’un mot étranger par les moyens linguistiques de la langue emprunteuse.

Par exemple, les mots français gratte-ciel, hors-la-loi, surhomme, journal mural sont des calques des mots sky-scraper (anglo-américain), outlaw (anglais), Űberrmensch (allemand) et стенгазета (russe). Au contraire, le mot anglais forget- me-not et l’allemand Vergissmeinnicht sont des calques du français ne m’oubliez-pas.

§ 24. Les emprunts aux langues européennes mortes

Le latin, qui est entré comme élément dans la formation de la langue française, a enrichi le vocabulaire français même après le IX-e siècle et le phénomène se continue encore. Cette opération est accomplie par les savants au cours des siècles, cherchant à satisfaire les besoins de la langue par des mots qui sont devenus nécessaires. Les mots latins empruntés par le français déjà formé sont appelés "mots de formation savante". Ces mots, n'ayant pas à subir les transformations phonétiques liées au développement du français primitif, diffèrent sensiblement des mots de formation populaire.

Il est arrivé, très souvent que les savants ont emprunté au latin des mots qui avaient déjà donné au français des mots de formation populaire. Il en résulte des paires de mots remontant au même prototype latin. On les appelle doublets. En voici quelques-uns des plus connus:

latin

formation populaire

formation savante

debitum

dette

débit

hospitalem

hôtel

hôpital

potionem

poison

potion

redempt ionem

rançon

rédemption

pastorem

pâtre

pasteur

fragilem

frêle

fragile

captivum

chêtif

captif

integrum

entier

intègre

mobilem

meuble

mobile

apprehendere

apprendre

appréhender

auscultare

écouter

ausculter

liberare

livrer

libérer

pensare

peser

penser

separare

sévrer

séparer

A analyser ces doublets dans le plan du vocabulaire moderne, on peut faire quelques remarques intéressantes:

  • Les doublets ne sont presque jamais synonymes, mais ils gardent souvent une certaine nuance de parenté sémantique.

  • Les formes populaires des doublets appartiennent aux zones plus habituelles et plus familières du langage, tandis que les formes savantes sont pour la plupart propres à la langue écrite, au domaine des lettres et des sciences.

  • Les variantes de la formation populaire, tranformées par l’usage oral et devenues méconnaissables, gardent davantage la forme phonétique, l'accent initial. Celles de la formation savante, empruntées par la langue écrite, déplacent

1’accent, mais gardent la forme étymologique.

Il y a aussi des doublets formés d'un mot de souche française et un mot emprunté à une autre langue néolatine, tous les deux dérivés du même mot latin. Par exemple:

latin: balneum français: bain bagne (ital.“bagno") campum champ camp (ital.“campo”)

caballarium chevalier cavalier (ital. “cavaliere”)

opera oeuvre opéra (ital. "opera")

dominam dame duègne(esp. "duena")

nigram noir nègre (esp. "negro")

De même, le français possède des mots qui gardent intacte la forme et souvent la prononciation latine originale: alibi, minimum, maximum, errata, memento, sic, ainsi que des formules comme ad hoc, de jure, de facto, in extremis, grosso modo, et caetera.

Enfin le latin a servi d’ intermédiaire pour 1’introduction d’un grand nombre de mots gaulois (alose, alouette), arabes (amalgame) et grecs (amarante, ammoniac, amphore, paroisse).

Donc la latinité est représentée dans le lexique français par trois couches de mots: mots de formation populaire, mots de formation savante et emprunts purs.

Les mots grecs sont entrés dans le français tout d'abord par l'intermédiaire du latin; ils datent de l'époque gallo-romaine, introduits d'abord par les conqué-rants romains (bourse, golfe, migraine), puis par l'église (évêque, apôtre, église). Un grand nombre de ces mots se sont francisés et ont été suivis par d'autres, restés intacts mais assimilés par la langue. Aux temps des croisades, beaucoup de mots ont été importés de l'Orient, y compris des mots grecs.

Une nouvelle couche, particulièrement riche, de mots grecs date de l'époque de la Renaissance. Bien des termes, scientifiques surtout, sont introduits dans le français: oligarchie, aristocratie, économie, etc. Ces emprunts sont d'abord livresques, puis ils pénètrent peu à peu dans la langue usuelle.

Les progrès des sciences, de la technique et de la philosophie à la fin du XVIII-e siècle et au XlX-e siècle rendent nécessaire une nouvelle terminologie, qui est créée pour la plupart à l'aide des éléments grecs. Ces mots pénètrent vite dans la langue populaire, avec l'application de la science à l'industrie. Tels sont, du XVIII-e siècle: encyclopédiste, coma, hypnose, dièdre, hectogramme, kilomètre, géologie, chlore, hidrogène, oxygène; du XlX-e siècle : dioptrie, biologie, histologie, diphtérie, helminthe, cleptomani, glucose, électron, électrode, et beaucoup d'autres. De même, les grands événements politiques de l'époque contribuent à la création de nombreux termes politiques, comme hégémonie, diplomatie. On emprunte non seulement des mots, mais aussi des affixes et des mots servant d'affixes, ce qui prouve la productivité de l'élément grec.

Les mots et les éléments de mots empruntés au latin et au grec ancien sont par tradition appelés "savants", par opposition à ceux qui sont parvenus par la voie populaire. Cependant le terme "mots savants" est devenu purement conventionnel dans le français moderne, car beaucoup d'emprunts aux langues mortes pénètrent de plus en plus profondément dans la langue commune. Tout Français se sert aujourd'hui non seulement des anciens emprunts tels que nature, facile, fatiguer, imaginer, penser, mais aussi des créations récentes comme photographie, téléphone, etc.