
- •Unité 1 Politique linguistique
- •Politique linguistique de la France
- •Politique linguistique de l'Union européenne
- •Politique officielle en faveur du multilinguisme
- •Traité de Maastricht
- •Charte des droits fondamentaux
- •Difficultés d'un tel système
- •Difficulté de la promotion du trilinguisme dans l'enseignement
- •Autres scénarios linguistiques
- •Système de type monarchique
- •Système de type oligarchique
- •Recours à une langue véhiculaire
- •Intercompréhension passive
Unité 1 Politique linguistique
On appelle politique linguistique, ou aménagement linguistique, toute politique conduite par un État ou une organisation internationale à propos d'une ou plusieurs langues parlées dans les territoires relevant de sa souveraineté, pour en modifier le corpus ou le statut, généralement pour en conforter l'usage, parfois pour en limiter l'expansion.
Une politique linguistique peut consister à faire évoluer le corpus d'une langue en adoptant un système d'écriture, en fixant le vocabulaire par l'établissement de lexiques ou de dictionnaires, en arrêtant des règles grammaticales et orthographiques, en favorisant la création terminologique pour limiter les emprunts aux langues étragères, etc. Elle peut même aller jusqu'à recréer une langue dont l'usage s'était perdu, c'est le cas de l'hébreu en Israël.
Elle peut également consister à modifier le statut d'une langue, par exemple en la déclarant langue officielle ou en en faisant la langue unique de l'administration et de la justice.
Une politique linguistique peut être déclarée ou seulement implicite. Ainsi les États-Unis d'Amérique n'ont pas de langue officielle dans leur constitution, cependant depuis l'origine, l'anglais est de fait la langue unique de l'administration.
Les politiques linguistiques prennent une importance particulière dans les États multilingues, qui sont amenés à légiférer parfois dans le moindre détail. C'est notamment le cas en Belgique pour le néerlandais et le français. C'est aussi un sujet sensible dans nombre de pays, dont la France, face à l'hégémonie grandissante de l'anglais.
Le cas de l'usage des langues régionales et de leur place face à une langue officielle dominante est aussi un sujet parfois très sensible.
De nombreux pays mènent une politique linguistique, qu'elle soit officielle ou implicite.
Politique linguistique de la France
Depuis 1994, le français est l'unique langue officielle en France.
Langues régionales
Depuis la deuxième guerre mondiale, on assiste à l'émergence de revendications pour la protection des langues régionales de France.
Aujourd'hui la France, par le biais de l'article 2 de la Constitution (« La langue de la République est le français ») et la loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française dite « loi Toubon » qui affirme le caractère obligatoire de l'enseignement en français et étend l'obligation d'employer le français dans les contrats privés, les messages transmis par les médias, les communications scientifiques, etc. Cette loi prévoit des dispositions particulières pour les langues régionales, mais rend de fait illégal tout enseignement monolingue hormis en français et s'interdit de financer les enseignements dans une autre langue, y compris celles traditionnellement parlées sur son territoire.
Le Conseil de l'Europe a adopté en 1992 la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires qui consacre « le droit imprescriptible de pratiquer une langue régionale dans la vie privée et publique ». En 1999, la France la signe, comme tous les pays de l'Union Européenne, mais sans la ratifier, à cause de son aspect anticonstitutionnel. La ratification lie juridiquement l'État contractant, la signature est une simple reconnaissance des objectifs généraux de la charte ; il n'y a donc aucune évolution de la situation des langues minoritaires en France, si ce n'est un vieillissement des locuteurs qui devrait amener les plus fragiles d'entre elles à disparaître avant la fin du XXIe siècle, après une existence pour certaines plus que millénaire.
Certains pensent que la politique française vise à imposer pour des motifs idéologiques la langue française comme langue unique de la République (« je ne veux voir qu'une seule tête, n'entendre qu'une seule langue »). Pour illustrer la vigueur de cette politique, ils s'appuient sur une phrase qui aurait été longtemps affichée dans certaines écoles primaires: « Il est interdit de cracher par terre et de parler breton », phrase qui juxtapose deux interdictions de nature différente, illustrant bien la nature des moyens employés pour parvenir à réaliser un linguicide en Bretagne.
L'exemple est-il bien choisi? À ce jour, personne ne peut attester l'existence de cette affiche. Fañch Broudic qui a mené une étude sur le sujet conclut à une extrapolation :
« Autant le principe édicté en 1897 par l'Inspecteur d'Académie du Finistère, Dosimont, selon lequel pas un mot de breton ne devait être prononcé ni en classe ni dans les cours de récréation est couramment référencé, autant il est difficile de retrouver trace de l'interdiction « de cracher par terre et de parler breton »… Sous réserve d'inventaire complémentaire, il faut considérer que la phrase que l'on brandit désormais comme un contre-slogan est, historiquement, une extrapolation. »
Cependant, si cette phrase n'a pas existé telle quelle, elle a bel et bien existé sous forme paraphrasée. Le même auteur cite le « Règlement pour les écoles primaires élémentaires de l'arrondissement de Lorient », adopté et arrêté par le Comité supérieur de l'arrondissement, en 1836 et approuvé par le recteur en 1842, qui stipule : « Art. 21. Il est défendu aux élèves de parler breton, même pendant la récréation et de proférer aucune parole grossière. Aucun livre breton ne devra être admis ni toléré. » S'exprimer en breton et parler « grossièrement » font l'objet de la même prohibition (dans « La pratique du breton de l'Ancien Régime à nos jours », chapitre 17).