Добавил:
Upload Опубликованный материал нарушает ваши авторские права? Сообщите нам.
Вуз: Предмет: Файл:
Chapitre 1.doc
Скачиваний:
1
Добавлен:
01.05.2025
Размер:
93.18 Кб
Скачать

Un développement économique inégal

La révolution industrielle engendre des disparités. Elles sont d’abord spatiales. Le processus d’industrialisation s’effectue à partir de quelques pôles de développement (François Perroux), basés sur une ou plusieurs industries motrices et exerçant un effet d’entraînement sur les régions avec qui elles ont des échanges. L’étude de la révolution industrielle pose ainsi le problème des continuités et du changement de la localisation. Quatre cas se distinguent :

1/ une région pré-industrielle devient industrielle

2/ une région non industrielle le reste

3/ une région non industrielle s’industrialise

4/ une région industrielle se désindustrialise.

Les cas de continuité apparaissent les plus simples à expliquer, car les mêmes facteurs de localisation continuent à jouer (attraction d’une métropole par exemple), mais peuvent aussi se renforcer (proto-industrie textile, bon réseaux de voies de communication, mines de charbon, etc.). Les régions qui n’ont jamais connu d’industries et qui s’industrialisent au XIXe le font parce qu’elles disposaient de ressources naturelles. Quant aux régions qui se désindustrialisent, elles le doivent à la modification des marchés et des courants commerciaux, au manque de charbon et surtout au sous-équipement en moyens de transport modernes.

Dans le temps, les crises induisent aussi d’importantes disparités. Les économistes du XIXe siècle (Sismondi, Karl Marx, Clément Juglar) les ont mis en évidence, de façon précoce. Ernest Labrousse a parlé, à leur propos, de crise mixtes, c’est-à-dire associant une crise agricole de type ancien et une crise industrielle de type nouveau. La crise mixte conserve les caractéristiques d’une crise d’ancien régime économique : les mauvaises récoltes réduisent les revenus paysans, donc la demande de produits industriels ; de plus, les travailleurs des villes consacrent une part plus élevée de leurs revenus à l’alimentation. En revanche, la conjoncture industrielle devient indépendante du mouvement du prix des grains, c’est-à-dire des mauvaises récoltes, l’origine des crises industrielle devant être cherchée de plus en plus dans la crise boursière, puis financière. Mais le modèle labroussien ne prend pas en compte toute la complexité du processus : les ruraux disposent de revenus indépendants des récoltes, la consommation populaire urbaine n’a peut être pas joué le rôle qu’on lui attribue, la liaison récolte-prix n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît, les pays étrangers jouent un rôle important à la fois pour les importations céréalières et les exportations textiles.

Les historiens britanniques ont mis en cause le modèle. Ils ne croient pas à la transmission de la conjoncture par l’intermédiaire de la demande. En effet, une industrialisation rapide a minimisé le rôle des crise mixtes et l’essor vigoureux des exportations rend l’industrie britannique moins dépendante des marchés extérieure. Selon Wrigley par exemple, la mauvaise récolte oblige à importer du blé, donc à exporter de l’or. Par suite, la banque d’Angleterre élève son taux de l’escompte, d’où un renchérissement du crédit et des difficultés accrues pour les entreprises. Quant à Bertrand Gille, il propose un troisième modèle. Selon lui, les mauvaises récoltes découlent d’une diminution des investissements agricoles. Celle-ci s’explique par l’attrait des placements industriels lors des booms d’investissement. Le cycle des investissements industriels commanderait donc l’économie dès le début XIXe siècle. Le débat demeure ouvert autour de l’interprétation de crises.

Un objet de controverses

La révolution industrielle demeure en effet l’objet d’un affrontement entre tout en ensemble d’interprétations, qui peuvent se regrouper en trois ensembles : les modèles classiques, les modèles contemporains et l’apport spécifique de l’économétrie.

Les modèles « classiques »

Au modèle marxiste s’oppose celui de Rostow. Dans son célèbre ouvrage, Le Capital, Karl Marx cherche à dégager les lois de fonctionnement du mode de production capitaliste, en s’appuyant sur le seul exemple britannique. Le capitalisme industriel obéit à une dynamique de croissance, ponctuée par des crises. Les entrepreneurs accumulent le capital fixe en capitalisant la plus-value, c’est-à-dire le prélèvement opéré sur le produit de la force de travail du travailleur. Or la population productive croit toujours plus vite que le besoin que le capital peut en avoir. En effet, la création croissante de plus-value permet une extension toujours plus grande du capital constant (le capital productif) que du capital variable (l’emploi de travailleurs productifs). Il s’ensuit la substitution du premier au second et l’accroissement du chômage des travailleurs, lesquels viennent renforcer « l’armée de réserve » du capitalisme et pèsent à la baisse sur les salaires moyens. Trois phénomènes y contribuent en parallèle : le sous-emploi masculin adulte chronique résultant de la très forte demande de travail pour les femmes et les enfants ; les gains de productivité agricole, qui réduisent le nombre des emplois nécessaires ; le développement du paupérisme.

Karl Marx appuie sa théorie sur une analyse historique. Il fait naître au Moyen-Age le capital usuraire et le capital commercial, insiste sur l’expansion commerciale du XVIe siècle, sur le rôle de l’exploitation coloniale et des intermédiaires financières. En Angleterre, le mouvement des enclosures fait disparaître la yeomanry et l’industrie domestique et naître le prolétariat que les lois sur les pauvres plient à la discipline qu’exige le système du salariat industriel. Les conditions sont dès lors remplies pour le développement de la manufacture. Au début la différence avec le passé n’est que quantitative. Mais la révolution industrielle, rend possible la conjonction de la manufacture avec sa main-d’œuvre déjà parcellaire et de la machine, dont l’accumulation primitive du capital rend possible l’usage croissant. Le machinisme alimente dès lors le développement du capitalisme industriel. Il se fonde sur des machines toujours plus puissantes, un capital constant toujours plus élevé, une durée du travail plus longue, un travail plus intense, un emploi accru des femmes et des enfants, le développement d’un chômage technologique venant renforcer « l’armée de réserve industrielle ».

Dans The Stages of Economic Growth, Walt W. Rostow propose une vision alternative. Il montre que toutes les économies développées passent par cinq étapes successives : la société traditionnelle, l’accumulation des conditions préalables, le take-off, la marche à la maturité, l’ère de la consommation de masse. La société traditionnelle correspond une structure déterminée par des fonctions de production limitées, elles-mêmes fondées sur la science et la technologie prénewtonienne. Productivité agricole et productivité industrielle butent sur des limites infranchissables. La plupart des ressources servent à acheter des produits agricoles. En conséquence de quoi les propriétaires fonciers dominent la hiérarchie sociale. Il ne s’agit pas toutefois d’une société immobile, car elle autorise des augmentations de production.

L’accumulation des conditions préalables précède le take-off. Elle implique trois conditions :

1/ une augmentation de la productivité agricole. Celle-ci permet de nourrir une population croissante, en particulier urbaine et d’accroître le revenu des agriculteur, donc les débouchés de l’industrie. Le surplus agricole met ainsi à la disposition de l’industrie les capitaux nécessaires aux investissement (directement, mais aussi par le biais de la fiscalité et de l’exportation)

2/ la mise en place d’une infrastructure de transports, souvent par intervention de l’Etat

3/ l’apparition d’une nouvelle élite, en particulier de chefs d’entreprises.

Le take-off (ou décollage) peut être déclenché par des stimuli technologique (Grande-Bretagne), politiques ou économiques. Il ouvre la voie à la croissance auto-entretenue. Il présente trois caractéristique : un changement d’ordre de grandeur du taux national d’investissement net, résultat de facteurs d’origine variable (l’accumulation par le commerce extérieurs dans le cas de la Grande-Bretagne) ; le développement de leading sectors (activités motrices), comme l’industrie cotonnière (Grande-Bretagne) ou, surtout, le chemin de fer ; l’existence ou les mise en place d’un appareil politique, social et institutionnel exploitant les tendances à l’expansion.

L’apport de Rostow est double. En premier lieu, il propose une chronologie du take-off (1783-1802 pour la Grande-Bretagne, pays le plus précoce), qui a fait l’objet de nombreuses discussions. En second lieu, il a défini deux notions essentielles : le take-off et le leading sector. Le premier offre une alternative à la notion de révolution industrielle : alors que celle-ci consiste en une transformation progressive de l’organisation de la production et du monde du travail, le take-off implique une accélération forte du taux de croissance du produit national brut ainsi que du taux d’investissement. Il peut donc y avoir révolution industrielle sans take-off, mais pas l’inverse. La notion de leading sector découle du fait que l’effet multiplicateur de l’investissement n’est pas le même suivant le secteur où s’applique cet investissement.

Соседние файлы в предмете [НЕСОРТИРОВАННОЕ]